شبكة الإستخبارات الإسلامية

Comment Israel fabrique le terrorisme et l'antisemitisme

Comment Israël manigance le Clash des Civilisations

Un rapport parlementaire[1] grotesque sur l'antisémitisme, auquel tous les partis ont participé, a vu le jour, ce mois-ci, au Royaume-Uni. La trajectoire de la longue campagne qui lui a donné naissance trouve son origine dans le lobbying intensif du gouvernement israélien, commencé il y a plus de quatre ans, au début de l'année 2002.

C'était lorsque Ariel Sharon finissait de mettre en lambeaux les restes des accords d'Oslo, en ré-envahissant les villes de Cisjordanie qui avaient été remises à l'Autorité Palestinienne. " Opération Bouclier Défensif " était le nom de ce déchaînement destructeur. C'est à ce moment-là que Sharon a fait entrer les médias israéliens dans la bataille. Inlassablement, les journaux locaux ont commencé à insister sur l'inquiétude d'une montée d'un "nouvel antisémitisme". Très vite, ce thème a été repris avec enthousiasme aux Etats-Unis par le lobby sioniste musclé.

Evidemment, ce n'était pas la première fois qu'Israël demandait à ses partisans américains de l'aider à s'en sortir. Dans "Beyond Chutzpah" [Au-delà du culot absolu] Norman Finkelstein prouve, documents à l'appui, que les allégations d'un nouvel antisémitisme sont apparues lors de la terne performance d'Israël pendant la Guerre du Kippour, en 1973. Cette fois, espérait-on, l'accusation d'antisémitisme pourrait être déployée contre les critiques, afin de réduire la pression exercée sur Israël pour qu'il rende le Sinaï à l'Egypte et qu'il négocie avec les Palestiniens.

Au début des années 80, alors qu'il faisait l'objet d'une critique sans précédent pour son invasion et son occupation du Liban, Israël a attiré l'attention du monde sur une nouvelle vague d'antisémitisme. Ce qui distinguait ce nouvel antisémitisme du racisme anti-Juif traditionnel — comme celui qui conduisit aux camps de la mort en Allemagne, disent ses promoteurs — était que cette fois-ci, il englobait la Gauche progressiste plutôt que l'extrême Droite.

Les dernières allégations d'antisémitisme ont commencé à voir le jour au printemps 2002. Le site internet de langue anglaise du quotidien de gauche israélien respecté, Haaretz, a placé un encart, pendant de nombreux mois, signalant un supplément en ligne spécial d'articles sur le "Nouvel Antisémitisme", mettant en garde que "la haine ancestrale" était en train de renaître en Europe et Amérique. Ce refrain a vite été repris par le Jerusalem Post, un quotidien de Droite de langue anglaise régulièrement utilisé par l'establishment israélien pour étayer le soutien à sa politique auprès des juifs de la Diaspora.

Les défenseurs d'Israël soutiennent que cette dernière vague d'antisémitisme, comme les précédentes, serait l'œuvre de mouvements progressistes occidentaux — avec, toutefois, une nouvelle tournure. L'antisémitisme occidental, toujours présent mais essentiellement latent, aurait été alimenté, jusqu'à la frénésie, par l'influence politique et intellectuelle croissante des immigrés musulmans extrémistes. L'insinuation était qu'une alliance contre nature s'était produite entre la Gauche et l'Islam militant.

Les premiers à diffuser de telles opinions furent les membres prédominants du gouvernement Sharon. Par exemple, dans une interview publiée dans le Jerusalem Post en novembre 2002, Benyamin Netanyahou annonçait que l'antisémitisme latent devenait à nouveau actif :"De mon point de vue, il y en a beaucoup en Europe qui s'opposent à l'antisémitisme, et beaucoup de gouvernements et de dirigeants qui s'opposent à l'antisémitisme, mais la tendance est là. C'est ignorer la réalité que de dire que [cette tendance] n'existe pas. À présent, elle s'est alliée à la force la plus puissante et la plus manifeste d'antisémitisme, qui la stimule, l'antisémitisme islamique, provenant de certaines minorités islamiques dans les pays européens. Celui-ci est souvent maquillé en antisionisme."

Netanyahou a proposé "d'enfoncer le clou" en démarrant une campagne de relations publiques agressive de "légitime-défense". Un mois plus tard, le président israélien, Moshé Katsav, choisissait la cible la plus facile de toutes, prévenant, lors d'une visite d'Etat, que le combat contre l'antisémitisme devait commencer en Allemagne, où des "voix de l'antisémitisme se font entendre".

Comme d'habitude, la cible principale de la nouvelle campagne d'antisémitisme était le public aux Etats-Unis, généreux protecteurs d'Israël. Là-bas, les membres du lobby d'Israël professèrent en chœur la catastrophe.

Dans les premiers stades de cette campagne, le lobby [sioniste] ne cachait pas sa véritable motivation : il voulait étouffer le débat naissant au sein de la société civile américaine et empêcher, en particulier, les églises et les universités de désinvestir — de retirer leurs investissements substantiels — d'Israël en réponse à l'Opération Bouclier Défensif.
En octobre 2002, après la réoccupation de fait de la Cisjordanie par Israël, Abraham Foxman, le directeur de l'Anti-Defamation League [la Ligue contre la Diffamation] sur lequel on peut toujours compter, mit dans le même panier les nouveaux antisémites et les détracteurs qui appelaient à désinvestir d'Israël. Celui-ci a poussé à la création d'un nouvel organisme, établi par le gouvernement israélien, le Forum pour la Coordination de la Lutte contre l'Antisémitisme, pour exprimer clairement "ce que nous savons au fond de nos cœurs et de nos entrailles : QUAND cette ligne [de l'antisémitisme] est franchie".
Deux semaines plus tard, Foxman avait trouvé son rythme, avertissant que les juifs n'avaient jamais été plus vulnérables depuis la Seconde Guerre Mondiale. Il a déclaré au Jerusalem Post : "Je n'aurais jamais cru que dans ma vie je serais ou nous serions préoccupés au niveau où nous le sommes, ou que [nous serions confrontés] à l'intensité de l'antisémitisme que nous sommes en train de subir".

Faisant écho à l'avertissement de Netanyahou, Foxman a ajouté que la propagation rapide du nouvel antisémitisme avait été rendue possible par la révolution des communications, principalement internet, qui permettaient aux Musulmans de relayer en quelques secondes, à travers le monde, leurs messages de haine, infectant les gens dans le monde entier.

Il est maintenant clair qu'Israël et ses partisans avaient trois objectifs principaux en tête lorsqu'ils ont commencé leur campagne. Deux de ces objectifs correspondaient aux motivations habituelles, comme lors des précédentes tentatives de mettre en avant le "nouvel antisémitisme". Le troisième était nouveau.

Le premier objectif, et probablement le mieux compris, était d'étouffer toute critique à l'égard d'Israël, en particulier aux Etats-Unis. Pendant l'année 2003, il est devenu de plus en plus évident, pour des journalistes comme moi, que la presse américaine — et, bientôt, une grande partie de la presse européenne — craignait de plus en plus d'imprimer ne serait-ce qu'une critique modérée d'Israël, ce qu'elle se permettait auparavant. Le temps qu'Israël commence augmenter la cadence de la construction de son mur monstrueux à travers la Cisjordanie, au printemps 2003, les rédacteurs en chef n'étaient plus très disposés à toucher à cette histoire.
De la même manière que le quatrième pouvoir se taisait, un grand nombre des voix progressistes dans nos universités et nos églises étaient devenues aphones. Le désinvestissement fut entièrement supprimé de l'ordre du jour. Des organisations Mccarthyistes, à l'instar de CampusWatch [Surveillance des Campus], ont aidé à imposer le règne de l'intimidation. Les universitaires qui ont tenu bon, comme Joseph Massad de l'Université de Colombia, ont attiré sur eux l'attention vindicative des nouveaux groupes d'activistes, tels que le David Project.
Un second objectif, moins remarqué, était le désir pressant d'empêcher tout fléchissement du nombre de Juifs à l'intérieur d'Israël. Ce qui pourrait bénéficier aux Palestiniens, alors que les deux groupes ethniques approchent de la parité démographique, dans la région que les Israéliens appellent le Grand Israël et les Palestiniens, la Palestine historique.

La démographie est une obsession de longue date du mouvement sioniste : pendant la guerre de 1948, l'armée israélienne a fait fuir en les terrorisant ou a chassé par la force 80% des Palestiniens vivant à l'intérieur des frontières de ce qui est devenu Israël pour lui garantir son nouveau statut d'Etat juif.

Mais au tournant du millénaire, à la suite de l'occupation par Israël de la Cisjordanie et de Gaza en 1967 et de la croissance rapide des populations palestiniennes opprimées, tant dans les territoires occupés qu'à l'intérieur d'Israël, la démographie a été de nouveau poussée en tête de l'agenda politique israélien.

Pendant la deuxième Intifada, alors que les Palestiniens luttaient contre la machine de guerre israélienne avec une vague d'attentats suicides contre des autobus dans les principales villes israéliennes, le gouvernement de Sharon craignit que les Juifs israéliens ne commencent à considérer l'Europe et l'Amérique comme un pari plus sûr que Jérusalem ou Tel Aviv. Le danger était que la bataille démographique pût être perdue si les juifs israéliens émigraient.

En suggérant que l'Europe, en particulier, fût devenue un foyer du fondamentalisme islamique, on espérait que les juifs israéliens, dont beaucoup possèdent plus d'un passeport, auraient peur de partir. Un sondage réalisé dès mai 2002 par l'Agence Juive montrait, par exemple, que 84% des Israéliens croyaient que l'antisémitisme était redevenu une menace sérieuse pour la communauté juive mondiale.

En même temps, les politiciens israéliens ont concentré leur attention sur les deux pays européens qui ont les plus grandes populations juives, la Grande-Bretagne et la France, toutes deux ayant aussi un nombre significatif d'immigrés musulmans. Ils ont accentué la montée supposée de l'antisémitisme dans ces deux pays, dans l'espoir d'attirer leurs populations juives en Israël.

En France, par exemple, des attaques antisémites particulières reçurent une abondante couverture médiatique : de celle d'un rabbin qui a été poignardé (par lui-même, s'avéra-t-il plus tard) à celle d'une jeune femme juive attaquée dans un train par une bande [de jeunes] antisémites (sauf qu'il s'avérera plus tard qu'elle n'était pas Juive [et que cette histoire était une invention]).

En juillet 2004, Sharon tira profit du climat de peur fabriqué pour soutenir que la France était en proie à "l'antisémitisme le plus sauvage", invitant les juifs français à s'intaller en Israël.

Cependant, on n'avait pas vu le troisième objectif auparavant. Celui-ci consistait à lier la montée du nouvel antisémitisme à la croissance du fondamentalisme islamique en Occident, insinuant que les extrémistes musulmans affirmaient un contrôle idéologique sur la pensée occidentale. Cela sonnait bien dans l'atmosphère de l'après-11 septembre.

Dans cet esprit, des universitaires juifs américains, à l'instar de David Goldhagen, représentèrent l'antisémitisme comme "évoluant" constamment. Dans un article intitulé "The Globalisation of anti-Semitism" [la mondialisation de l'antisémitisme], publié en mai 2003 dans l'hebdomadaire juif américain Forward, Goldhagen expliquait que l'Europe avait exporté son antisémitisme raciste classique vers le monde arabe, qui réinfectait en retour l'Occident.

"Ensuite, les pays arabes ont réexporté cette nouvelle démonologie hybride vers l'Europe et, se servant des Nations Unies et des autres institutions internationales, vers d'autres pays. En Allemagne, en France, en Grande-Bretagne et ailleurs, le ton et l'agitation antisémites intenses d'aujourd'hui utilisent les vieux tropes appliqués autrefois aux juifs locaux — accusations de semer le désordre, voulant subjuguer les autres — avec un nouveau contenu dirigé pour la majeure partie contre les juifs à l'extérieur de leurs pays".

Cette théorie d'une contagion de haine envers les juifs "qui ne repose sur rien", répandue par les Arabes et leurs sympathisants, via internet, les médias et les institutions internationales, a séduit beaucoup de monde. La journaliste néoconservatrice britannique, Mélanie Philips, a affirmé de façon générale, voire ridicule, que l'identité britannique était ébranlée et écartée par une identité islamique qui transformait son pays en capitale de la terreur, "Londonistan".

Si cet objectif ultime des instigateurs "du nouvel antisémitisme" a connu autant de succès, c'est parce qu'il pouvait être facilement combiné avec d'autres idées liées à la guerre contre le terrorisme de l'Amérique, comme le clash des civilisations. Si c'était "nous" contre "eux", alors [la théorie] du nouvel antisémitisme avançait dès le début que les juifs étaient du côté des anges. C'était à l'Occident chrétien de décider s'il voulait faire un pacte avec le bien (le Judaïsme, Israël, la civilisation) ou le mal (l'Islam, Oussama Ben Laden, Londonistan).

Nous sommes loin d'être arrivés au bout de cette route traîtresse, à la fois parce que la Maison Blanche est en faillite d'initiatives politiques en dehors de sa guerre contre le terrorisme et parce que la place d'Israël est assurée, pour le moment, au cœur de l'agenda néoconservateur de l'administration américaine.

La semaine dernière, cela a été rendu bien clair par Netanyahou, le politicien le plus populaire en Israël, lorsqu'il a rajouté une couche de malice redoutable à la machine de désinformation néoconservatrice, alors qu'elle se prépare à une confrontation avec l'Iran sur ses ambitions nucléaires. Netanyahou a comparé l'Iran et son président, Mahmoud Ahmadinejad, à Adolf Hitler.

"Hitler s'est d'abord lancé dans une campagne mondiale et il a ensuite essayé d'obtenir des armes nucléaires. L'Iran essaye d'obtenir d'abord des armes nucléaires. Par conséquent, de cette perspective, l'Iran est beaucoup plus dangereux", a déclaré Netanyahou aux décideurs israéliens de l'antiterrorisme.

L'insinuation de Netanyahou était limpide : L'Iran est à la recherche d'une nouvelle solution finale, celle-ci prendra Israël pour cible, de même que l'ensemble de la communauté juive dans le monde. Selon Tzipi Livni, la ministre des affaires étrangères d'Israël, l'heure des comptes a presque sonné : elle affirme contre toute évidence que l'Iran est à seulement quelques mois de posséder des armes nucléaires.
"Le terrorisme international est un terme erroné", a jouté Netanyahou, "non pas parce qu'il n'existe pas, mais parce que le problème est l'Islam militant international. C'est ce mouvement… qui actionne la terreur au niveau international, et c'est ce mouvement qui prépare la terreur ultime, le terrorisme nucléaire".

Confronté aux desseins maléfiques des "fascistes islamiques" (l'Iran, par exemple), l'arsenal nucléaire d'Israël — et l'Holocauste nucléaire qu'Israël peut et semble préparé à déclencher — peut être présenté comme le salut du monde civilisé.Jonathan Cook, écrivain et journaliste, est basé à Nazareth, en Israël. Son livre Blood and Religion: The Unmasking of the Jewish and Democratic State est publié chez Pluto Press.

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]

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