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FRANÇAFRIQUE : TOUT SUR LES NOUVEAUX RÉSEAUX : LES HOMMES ET LEUR CONNEXION.

Alors que le 25e sommet « Afrique-France », qui est aussi celui du cinquantenaire des « indépendances », se tient à Nice les 31 mai et 1er juin 2010, l’affaire est assez emblématique des mutations de cet étrange serpent de mer qu’est la « Françafrique ». Chacun sait depuis le 15 mai 2010 que la libération de l’universitaire Clotilde Reiss est en partie due à une « médiation sénégalaise » au sein de laquelle l’avocat Robert Bourgi, aussi talentueux que multicarte et seul héritier du savoir-faire « foccartien », a joué un rôle déterminant.

 
 Photo d’archive du 23ème sommet de « France-Afrique » à Bamako du 03 au 04 décembre 2005.





Seuls trois hommes étaient au courant du « voyage secret » en Iran de Me Bourgi et de Karim Wade, à la fin de mars 2010 : le père de ce dernier, Abdoulaye Wade, et à Paris Nicolas Sarkozy et son secrétaire général, Claude Guéant, à qui les deux émissaires ont régulièrement rendu compte au téléphone, depuis Téhéran, des progrès de leur mission. Ni Bernard Kouchner, ni Jean-David Levitte, ni même le patron de la « DGSE », Erard Corbin de Mangoux, ne savaient quoi que ce soit de ce déplacement feutré.
 
Culte du secret, court-circuitage des filières institutionnelles, casquettes africaines et contacts parallèles activés par un personnage à la réputation (forcément) sulfureuse et qui en joue avec habi1été : la méthode Foccart transposée dans l’Orient compliqué a donc, si l’on peut dire, porté ses fruits. Si la « Françafrique » « incestueuse » et « patrimoniale » est morte, celle des réseaux est, elle, toujours bien vivante. À une différence - de taille ­près : elle est acéphale. Là où Jacques Foccart, qui consacrait l’essentiel de son temps aux affaires du « pré carré », tirait tous les fils à la manière d’un grand marionnettiste, Claude Guéant, pour qui l’Afrique n’est qu’une préoccupation parmi d’autres, intervient directement ou par intermédiaire interposé que sur certains dossiers sensibles. D’où l’éclatement et la multiplication de « réseaux » souvent complémentaires « Elysée-business » par exemple, reliés entre eux par des passerelles (avocats, juges, médecins), ouvertement «rivaux (ONG) », transcourants (francs-maçons), etc., mais qui tous fonctionnent en interne avec de vraies solidarités corporatistes et une opacité commune.

Autre évolution : les « réseaux » sont désormais autant « afro-français » que « franco-africains » et leur interpénétration réciproque est fréquente. Un Laurent Gbagbo, un Paul Biya, un Denis Sassou N’Guesso, un Ali Bongo Ondimba, pour ne citer qu’eux, ont tous leur « réseau » d’influence qui emprunte à chacun (ou presque) des « réseaux » français. Conséquence de cette alchimie complexe, qui tient parfois de la raffinerie :

L’apparition de missi dominici dont on distingue mal a priori l’allégeance principale. Il faut ainsi de bons yeux pour hiérarchiser les fidélités dont se réclame aujourd’hui l’incontournable Robert Bourgi : Sarkozy et Guéant en premier lieu, puis Wade, Ali Bongo Ondimba, Ould Abdelaziz, Gbagbo et quelques autres. Il est vrai que, en ce domaine, chacun avance masqué. Le petit « who’s who » que nous publions cette semaine - et d’où sont exclus les ministres pour qui l’Afrique fait en quelque sorte partie du Job, tels Bernard Kouchner et Alain Joyandet - a pour ambition de guider les pas du profane dans le maquis de la « néo-Françafrique ». Nous avons volontairement omis dans ce vade-mecum les pays du Maghreb, qui relèvent, eux, de réseaux bilatéraux à la fois différents et étanches, sur lesquels nous reviendrons prochainement.

ÉLYSÉE CONNECTION

Aux côtés d’un président qui n’a que peu d’appétence pour les « affaires africaines » et dont la doctrine à ce sujet a évolué, de discours en discours, de manière quelque peu erratique, c’est au secrétaire général de l’Élysée, Claude Guéant, que revient la gestion du réseau ou de ce qu’il en reste. Au niveau institutionnel, le conseiller diplomatique Jean-David Levitte et son adjoint chargé du Sud-Sahara (Mauritanie comprise), André Parant lequel bénéficie de l’apport de deux conseillers techniques : Remi Maréchaux et Clément Leclerc -, dépendent directement de lui. Mais Levitte n’ayant jamais manifesté de tropisme africain particulier en dehors de la préparation des voyages et sommets présidentiels, l’omniprésente éminence grise du Château a la main sur le continent. Claude Guéant reçoit volontiers dans son bureau les émissaires des chefs d’État et se déplace pour rencontrer ces derniers dans les grands hôtels ou ils descendent lors de leurs passages à Paris.

L’avocat Robert Bourgi lui sert à la fois de conseil, de missi dominici et de poisson-pilote sur des pays comme le Gabon, le Sénégal, la Mauritanie, Madagascar, le Bénin, voire la Côte d’Ivoire ou le Togo. Mais il n’est pas le seul, même si les autres « africains » figurant dans le carnet d’adresses de Guéant jouent un rôle beaucoup plus restreint. Georges Ouegnin, l’ancien directeur du protocole de la présidence ivoirienne, très introduit à Brazzaville et à la présidence de la « Banque africaine de développement (BAD) », est de ceux-là, tout comme le diplomate, ex-conseiller spécial d’Idriss Déby Itno (et décoré de la légion d’honneur), Abakar Manany, qui a joué un rôle non négligeable dans la reprise des relations entre la France et le Rwanda. Difficile par ailleurs de ne pas citer le nom du député-maire de Levallois-Perret, Patrick Balkany, ami de Nicolas Sarkozy, électron libre quelque peu sulfureux que l’on a vu à l’œuvre à Kinshasa, Bangui et Nouakchott.

Autres francs-tireurs : les anciens ministres Charles Millon et Alain Madelin. Proche d’Abdoulaye Wade, ce dernier continue d’entretenir des liens avec l’Afrique par le biais du Fonds de solidarité numérique (accès aux nouvelles technologies), qu’il préside. Côté « UMP », le porte­parole adjoint (et conseiller de Nicolas Sarkozy), Dominique Paillé, passe parfois des messages entre l’Élysée et Abidjan (ou l’inverse), ainsi que le font, avec Lomé, le député du Rhône, Christophe Guilloteau, membre d’une demi-douzaine de groupes d’amitié franco-africains à l’Assemblée. L’ex-chiraquien Jacques Toubon, à la tête de la « mission du cinquantenaire » et qui occupe, au « Quai d’Orsay », les anciens bureaux du secrétariat d’État de Rama Yade, ne s’est jamais éloigné du continent et a trouvé dans son éphémère fonction l’occasion de renforcer ses liens. Enfin, à la périphérie, évoluent une poignée de publicistes tel Laurent Taïeb, dont le périodique L’Essentiel des relations internationales, souvent axé sur l’Afrique et lié à l’« UMP », est à disposition dans tous les salons d’attente de l’Élysée. Malin, Taïeb a trouvé dans les cercles d’amateurs de cigares qu’il anime un réseau d’influence original. À portée de main du Château également, le chirurgien­dentiste Patrick Gaubert, ancien membre du cabinet de Charles Pasqua, président du « Haut Conseil à l’intégration », président d’honneur de la « Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) » et ami de vingt-cinq ans de Nicolas Sarkozy. Gaubert, Toubon, ainsi que les députés « UMP » Jean-Michel Fourgous et Jean­François Mancel étaient à Brazzaville en juillet 2009 pour observer le scrutin présidentiel à l’invitation de la « Commission nationale congolaise des droits de l’homme », proche du pouvoir. Au grand étonnement du « Quai d’Orsay ». Mais avec l’accord tacite de Claude Guéant.

LES GRANDS COMMIS

Contrairement aux idées reçues, l’Élysée ne fait pas tout. Exemple : la réconciliation franco-rwandaise. À son arrivée au « Quai », en juin 2007, Bernard Kouchner confie ce casse-tête à une « task force » où figurent sa conseillère Afrique, Charlotte Montel, la trentaine dynamique, sa conseillère juridique, Sylvie Pantz, et un quadra faussement nonchalant, Laurent Contini. Au bout d’un an de remue-méninges, ils trouvent la solution.

« Si l’un des neuf inculpés rwandais se livre à la justice française, Kigali aura accès au dossier de l’attentat contre Habyarimana et pourra retarder la procédure à loisir ». Le coup marche. Les relations diplomatiques sont rétablies et le nouvel ambassadeur de France à Kigali s’appelle Laurent Contini. Pour exister face à l’Élysée, le « Quai » ne se contente pas de faire des coups. Jour après jour, il laboure le terrain. Chef des labours :

Stéphane Gompertz, directeur Afrique et vieux briscard. Tous les matins, il digère les dizaines de « TD (télégrammes diplomatiques) » que lui envoient ses ambassades et produit des notes de synthèse. Certains « TD » sont plus lus que d’autres. Notamment ceux des ambassadeurs de poids, comme Bruno Joubert à Rabat, Jean­Marc Simon à Abidjan, Jean­Didier Roisin à Libreville, Jean­Christophe Belliard à Addis-Abeba ou Jean-Marc Châtaigner à Antananarivo. Et bien sûr les « TD littéraires » de l’académicien Jean-Christophe Rufin, qui achève un séjour de trois ans à Dakar. Moins connue, Sylvie Bermann joue un rôle pivot au « Quai ». C’est elle qui gère les Français de l’« ONU » et de l’« UE », notamment le chef des opérations de maintien de la paix, Alain Leroy, et l’ambassadeur à New York, Gérard Araud.

Autre personnage clé aux Affaires étrangères : Georges Serre. L’ancien conseiller Afrique d’Hubert Védrine supervise aujourd’hui l’aide au développement. Tous les jeudis après-midi, il accompagne Montel, Gompertz et Berann à l’Élysée pour assister à la réunion Afrique autour d’André Parant. À la Défense, le chef d’état-major des armées, l’amiral Édouard Guillaud, est l’homme incontournable. Certes, il n’a pas de passé africain, mais cet ancien chef d’état-major particulier de Nicolas Sarkozy a toute la confiance du chef de l’État. À la réunion du jeudi à l’Élysée, il délègue le colonel Jean-Jacques Toutous, un marsouin (troupes de marine) qui a crapahuté sur le continent. Toutous y retrouve le colonel Benoît Houssay, un chasseur alpin affecté au cabinet du ministre de la Défense, Hervé Morin. Autre homme influent, le général Emmanuel Beth. Cet ancien patron de la « force Licorne » en Côte d’Ivoire supervise toute la coopération militaire (détachement d’instructeurs, accueil d’élèves officiers en France, etc.). Depuis deux ans, depuis le discours de Nicolas Sarkozy au Cap, il faut compter aussi avec les deux grands commis de l’Etat qui renégocient les accords de défense entre la France et ses ex­colonies. Côte à côte, François­Xavier Deniau et le général Benoît Puga, un diplomate et un officier … aux états de service longs comme le bras. En 1978, le légionnaire Puga a sauté sur « Kolwezi », au Zaïre. Puis, après avoir fait le coup de feu en Centrafrique et au Tchad, il a dirigé le « Commandement des opérations spéciales (COS) » et la « Direction des renseignements militaires (DRM) ». Aujourd’hui, il est chef d’état-major particulier du président de la République. Bref, c’est le « baroudeur africain » de Nicolas Sarkozy. La lutte contre « Al-Qaïda » est confiée à Bernard Bajolet. L’homme connaît bien la question du terrorisme. Avant de coordonner les services de renseignements à l’Élysée, il a été ambassadeur à Bagdad, puis à Alger. Erard Corbin de Mangoux, le patron de la « Direction générale de la sécurité extérieure (DG SE) », a moins d’expérience de terrain, mais il apprend vite. Depuis dix-huit mois, il a fait quelques voyages discrets en Afrique du Nord et au Sahel, notamment pour faire libérer plusieurs otages français. Et il a noué un contact privilégié avec quelques hommes d’État, comme le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz. Quant à la politique économique, elle est suivie par deux membres du cabinet de Christine Lagarde, Christophe Bonnard et Jean-René Cougard, en liaison permanente avec Ambroise Fayolle, le représentant de la France au « FMI » et à la « Banque mondiale ». La « zone franc », elle, est jalousement gardée par la direction du Trésor, c’est-à-dire par Ramon Fernandez -le fils de l’écrivain Dominique Fernandez, Rémy Rioux et Thomas Groh, le chef du bureau Afrique subsaharienne à « Bercy ».

Personnages de l’ombre ? Sans doute. Mais avec Christian Noyer, le gouverneur de la « Banque de France », ce sont eux qui gèrent le compte d’opération de la « zone franc » et supervisent les activités de l’« Agence française de développement », dont le tout nouveau directeur général, Dov Zerah, a été personnellement choisi par… …Nicolas Sarkozy. Loin des projecteurs, ils exercent le vrai pouvoir.


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