Mali : La nouvelle guerre de l'AFRICOM ?
Par Rick Rozoff,
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Le 23 fevrier 2012
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Les dépêches de presse parlent de l’intensification des combats au Mali entre militaires et rebelles ethniques touaregs du Mouvement de libération nationale Azawad dans le nord de ce pays [1].
Comme les seules agences
d’informations à portée mondiale et avec les fonds et les
infrastructures pour maintenir des bureaux et des correspondants partout
dans le monde sont celles qui résident dans les principaux Etats
membres de l’OTAN : Associated Press, Reuters, Agence France-Presse, la
BBC News et Deutsche Presse-Agentur, la couverture de l’actualité au
Mali, comme ce qui se produit dans presque n’importe quel autre pays,
reflète un parti pris de l’Ouest et un ordre du jour de l’Ouest.
Par conséquent, les titres typiques sur le sujet, sont les suivants :
Pour atteindre le Mali depuis la Libye c’est un
voyage d’au moins 800 kilomètres à travers l’Algérie et / ou le Niger.
Comme les rebelles évidemment n’ont pas de force aérienne, ni d’avions
de transport militaire, les manchettes et la propagande ci-dessus
implique que les combattants touaregs ont couvert à pied tout le chemin
depuis la Libye jusqu’à leur pays dans des convois avec des armes
lourdes à travers au moins un autre pays sans être détectés ou empêchés
par les autorités locales. Et tout cela, en outre, pour lancer une
offensive trois mois après l’assassinat du dirigeant libyen Mouammar
Kadhafi après que son convoi ait été attaqué par les bombes françaises
et les missiles Hellfire US en Octobre dernier. Mais l’implication selon
quoi que l’Algérie et le Niger, en particulier la première, sont
complices de la circulation des combattants touaregs et des armes de la
Libye vers le Mali est de mauvais augure en termes d’expansion des
accusations -et des actions- occidentales dans la région.
Des Rébellions armées sont traités de façon
différente dans les nouvelles du monde dominé par l’Occident selon la
façon dont les rebelles et les gouvernements auxquels ils s’opposent
sont considérés par les membres supérieurs de l’OTAN.
Ces dernières années, ces derniers ont fourni un
soutien militaire et logistique aux formations rebelles armées -dans la
plupart des cas d’attaques frontalières et à but séparatistes et
irrédentistes - au Kosovo, en Macédoine, au Libéria, en Côte-d’Ivoire,
en Libye et en Syrie d’aujourd’hui, et sur les front d’espionnage et
« diplomatiques » en Russie, Chine, Pakistan, Soudan, Indonésie, Congo,
Myanmar, Laos et Bolivie.
Cependant, les grandes puissances de l’OTAN ont
adopté la direction opposée quand il s’agit de la Turquie, du Maroc
(avec ses 37 années d’occupation du Sahara occidental), de la Colombie,
des Philippines, de la République Centrafricaine, du Tchad et d’autres
nations qui sont leurs clients militaires ou se trouvent dans des
territoires contrôlé par eux, où les Etats-Unis et leurs alliés
occidentaux fournissent des armes, des conseillers, des forces spéciales
et les dites forces de maintien de la paix.
Le battement de tambour de nouvelles alarmantes sur
le Mali est le signe que l’Occident à l’intention d’ouvrir un nouveau
front militaire en Afrique après la campagne aérienne de 7 mois, les
forces navales et spéciales contre la Libye et la poursuite des
opérations en Somalie et en Afrique centrale avec le récent déploiement
des forces spéciales des Etats-Unis en Ouganda, au Congo, dans la
République centrafricaine et au Sud-Soudan. En février,
en Côte-d’Ivoire, voisin au sud du Mali, l’armée française, avec les
complaisantes troupes des Nations Unies– « soldats de la paix » - ont
effectué des tirs de roquettes sur la résidence présidentielle et démis
par la force le président Laurent Gbagbo.
Le Commandement pour l’Afrique des Etats-Unis
(AFRICOM) est devenu opérationnel pour la première fois en tant que
force de combat dans ce qui devait être le début de la première
quinzaine de la guerre contre la Libye en Mars [2011] avec l’« Opération Odyssée Dawn » avant de transférer la campagne vers l’OTAN pendant sept mois d’incessants bombardements et attaques de missiles.
Le Mali pourrait devenir la seconde opération militaire de l’AFRICOM.
Le pays, enclavé, est le rayon de la roue de
l’ancienne Afrique occidentale française, avec des frontières avec
presque tous les pays membres, sauf le Bénin : le Burkina Faso, la
Guinée (Conakry), Côte-d’Ivoire, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal.
Il partage également des frontières avec l’Algérie, autre ancienne
possession française, vers le nord.
Le Mali est le troisième producteur d’or en Afrique,
après l’Afrique du Sud et le Ghana. Il a des gisements d’uranium
considérables gérés par des concessions françaises dans le nord, scène
des combats actuels. les exigences des touaregs portent sur l’obtention
d’un certain contrôle sur l’extraction d’uranium et la répartition des
recettes qu’ils génèrent. Des explorations importantes de pétrole et de
gaz naturel, également dans le nord, ont été aussi menées récemment.
La nation est aussi un élément clé dans la
« Coopération contre le terrorisme Trans-Sahara des États-Unis »créée en
2005 (d’abord comme Initiative contreterrorisme Trans-Sahara), qui a
résulté de l ’« Initiative pan-Sahel » pour 2003-2004.
En mai, les « opérations spéciales de commandement en Europe, des États-Unis » a lancé la « Trans-Sahara Counterterrorism initiative » en envoyant 1.000 soldats des forces spéciales au Nord-Ouest de l’Afrique pour l’ « Opération Flintlock » (« Opération Gun Spark »)
afin de former les forces armées du Mali, Algérie, Tchad, Mauritanie,
Niger, Sénégal et Tunisie, les sept membres de départ africains de la « Trans-Sahara Counterterrorism initiative »,
qui, dans son format actuel comprend également le Burkina Faso, le
Maroc et le Nigeria. La Libye sera bientôt introduite dans ce format
ainsi que la coopération militaire du dialogue méditerranéen de l’OTAN.
Les Forces Spéciales des Etats-Unis ont mené la première de ce qui est devenue les « Opérations Flintlock »
annuelles d’exercices de contre-insurrection avec les nations
mentionnées dans le Sahel et le Maghreb. L’année suivante, l’OTAN a mené
des jeux de guerre à grande échelle de la « Steadfast Jaguar »
dans l’île du Cap-Vert pour lancer la Force de réaction de l’OTAN, en
vertu de laquelle elle a façonné la Force africaine auxiliaire.
« Flintlock 2007 » et « 2008 » ont eu lieu au Mali. « Flintlock 10 » dans plusieurs pays africains dont le Mali.
Le 7 Février de cette année, les États-Unis et le Mali ont lancé l’exercice de parachutage conjoint « Atlas Accord 12 » dans la nation africaine, mais le « Flintlock 12 »,
prévu pour au plus tard ce mois-ci, a été reporté en raison des combats
dans le nord. Devaient y être impliqués seize pays, y compris plusieurs
des principaux alliés des États-Unis dans L’OTAN.
Le « Flintlock 11 »
l’an dernier comprenait des unités militaires provenant des États-Unis,
Canada, France, Allemagne, Hollande, Espagne, Mali, Burkina Faso, le
Tchad, la Mauritanie, le Nigeria et le Sénégal.
Lorsque l’AFRICOM est devenu un « Commandement de
combat unifié indépendant » le 1er Octobre 2008, le premier nouveau
commandement militaire régional des États-Unis mis en place à l’étranger
dans l’après-guerre froide, l’ « AFRICOM and Special Operations Command Africa’s Joint Special Operations Task Force-Trans Sahara »
a pris le contrôle des exercices « Flintlock » du « Commandement
européen des États-Unis » et du « Commandement européen des opérations
spéciales des Etats-Unis ».
En 2010, l’AFRICOM a annoncé que le « Commandement des opérations spéciales en Afrique » va prendre le contrôle de la « Task Force d’opérations spéciales Trans Sahara (JSOTF-TS) » et du « commandement des Opéerations spéciales et contrôle des éléments-Corne de l’Afrique (SOCCE-HOA). »
L’année dernière, la page Web de l’AFRICOM a écrit :
« Réalisé par Special Operations Command Africa, Flintlock
est un exercice multinational interarmées pour améliorer l’échange
d’informations aux niveaux opérationnel et tactique dans la région du
Sahara, tout en favorisant une collaboration et coordination plus
accrue. Il met l’accent sur l’interopérabilité militaire et la capacité
d’intervention pour les États-Unis et les pays partenaires américains et
européens, et les unités sélectionnées dans le Nord et Afrique de
l’Ouest. »
Bien que le but déclaré de la Coopération « Trans-Sahara Counterterrorism » et de ses exercices multinationaux « Flintlock »
est de former les militaires des pays du Sahel et du Maghreb dans la
lutte contre les groupes extrémistes islamiques de la région, en fait,
les États-Unis et leurs alliés ont livré une guerre contre le
gouvernement libyen l’année dernière avec l’appui d’éléments similaires,
et l’application pratique de la formation militaire et le déploiement
du Pentagone en Afrique du Nord et de l’Ouest a été la lutte contre les
milices touaregs plutôt que des groupes comme « Al-Qaïda du Maghreb
islamique » ou « Boko Haram » au Nigeria.
Les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN ont
également effectué et appuyé d’autres exercices militaires dans la zone à
des fins similaires. En 2008, la « Communauté économique des États
d’Afrique occidentale » (CEDEAO), groupe économique régional qui a été
formé par la « Force auxiliaire d’Afrique de l’Ouest », soutenu par les
États-Unis et l’OTAN, a mené un exercice militaire appelé « Jigui 2008 »
au Mali, « soutenu par les gouvernements des pays hôtes ainsi que la
France, le Danemark, le Canada, Allemagne, Hollande, Royaume-Uni,
États-Unis et l’Union européenne », comme l’a rapporté l’agence Ghana
News à l’époque.
L'AFRICOM dirige également des exercices
de l'« Afrique Endeavor » interopérabilité multinationale des
communications principalement en Afrique de l’Ouest. La conférence de
planification a eu lieu l’an dernier à Bamako, capitale du Mali et,
selon l’armée US en Afrique, « a réuni plus de 180 participants
provenant de 41 pays africains, d’Europe et d’ Amérique du Nord ainsi
que des observateurs de la Communauté économique des Afrique de l’Ouest
(CEDEAO), Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC), la
Force auxiliaire Afrique de l’Est et de l’OTAN pour planifier les tests
d’interopérabilité des systèmes de communication et d’information des
nations participantes. » Le principal exercice a également été mené au
Mali.
L’armée US est installée dans ce pays depuis au moins
2005 et Voice of America a révélé que le Pentagone avait « mis en place
un centre temporaire d’opérations dans une base aérienne près de Bamako
au Mali. L’installation fournira des services de soutien logistique et
d’urgence pour les troupes américaines pour former les forces locales
dans cinq pays de la région. »
L’année suivante, le Commandement européen des
États-Unis et le chef du Commandant suprême de l’OTAN en Europe le
général James Jones des Marines premier conseiller de sécurité nationale
de l’administration Obama, « a fait cette révélation [que] le
Pentagone veut avoir accès à des bases ... aux Sénégal, Ghana, le Mali
et le Kenya et d’autres pays africains », selon un article au Ghana Web.
En 2007, un soldat du premier bataillon, Groupe
spécial de Forces 10 basé à Stuttgart, en Allemagne, qui abrite le siège
de l’AFRICOM, est mort à Kidal, au Mali, où l’on combat en ce moment.
Sa mort a été attribuée à un « incident non liés au combat ».
L’année suivante, un soldat du programme d’aide militaire et de
formation des Forces canadiennes a aussi perdu la vie au Mali.
L’année dernière, le Régiment d’opérations spéciales
du Canada a envoyé des troupes dans la zone de conflit dans le nord du
Mali pour ce qui a été décrit comme « une mission permanente ». Des
Forces du Régiment canadien d’opérations spéciales a également participé
à l’exercice « Flintlock 11 » au Sénégal.
En Septembre 2007, un avion US de transport
militaire, un Hercule C-130, a été touché par des tirs de fusil tandis
qu’il parachutait du matériel aux troupes maliennes assiégées par les
forces touareg.
Selon Stars and Stripes :
« L’avion et son équipage appartenant au 67è
Escadron d’Opérations Spéciales, étaient au Mali dans le cadre d’un
exercice déjà prévu appelé « Flintlock 2007 »
... les troupes maliennes ont été cernées dans leur base dans la
région de Tin-Zaouatene près de la frontière algérienne par des
combattants armés et ne pouvaient pas se ravitailler ... Le gouvernement
du Mali a appelé les forces des États-Unis pour que soit mené un
parachutage ... »
En 2009 aux États-Unis annoncé qu’elles avaient
fourni au gouvernement du Mali plus de 5 millions de dollars en nouveaux
véhicules et autres équipements.
Plus tard la même année sur le site de la Force aérienne US en Europe a été rapporté :
« La première mission du C-130J Super Hercules en
appui de la Force Aérienne des États-Unis en Afrique, ou 17è Air Force, a
ouvert la porte à la future coopération de soutien entre la 86e Airlift Wing et les futures missions en Afrique.
« Le commandant de bord de la mission, le Major Robert May du 37ème escadron Airlift, et son équipage ont reçu l’ordre de voler au Mali le 19 Décembre pour ramener à la maison 17 soldats qui aidaient à la formation des forces maliennes. »
Les États-Unis ont été impliqués dans la guerre du
Mali pendant près de douze ans.Les histoires récentes sur des atrocités
dans les médias occidentaux alimenteront la demande d’intervention sous
la « responsabilité de protéger » dans le style de celles de la Côte
d’Ivoire et de la Libye l’an dernier et de fournir un prétexte à une
intervention militaire des Etats-Unis et des pays de l’OTAN.
C’est possible que l’AFRICOM soit en train de planifier sa prochaine guerre.
Rick Rozoff, Chicago, le 16 février 2012.
Article original en anglais : Mali: U.S. Africa Command's New War? 15 février 2012 Article traduit de l'anglais par Germán Leyens pour Rebelión : Mali ¿Nueva guerra del Comando África de EE.UU.? Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Estelle et Carlos Debiasi Cette création par http://www.elcorreo.eu.org est mise à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 Unported.
El Correo. Paris, le 23 février 2012.
Notes
[1] Le peuple touareg ou imuhagh, amazighs
est un peuple berbère qui habite le nord et l’ouest du Sahara et du
Sahel septentrional. Pour les Touareg, le Sahara n’est pas un désert,
mais, un ensemble de plusieurs et ils font la différence entre de
nombreux déserts plus ou moins arides, plats ou montagneux. La langue
des Touaregs ou Tamasheq est un groupe de variantes berbères - le amazighs, le tamahaq et Tamajaq (ou tamajaght).
Appartenant à la famille des langues afro-asiatiques. Les variantes
touareg sont les seules du groupe berbère à avoir conservé la forme
écrite de l’alphabet libyco-berbère, également appelé tifinagh,
dont l’utilisation a été documentée depuis le troisième siècle Av JC
jusqu’au troisième siècle après JC. tout au long de l’Afrique du Nord et
dans les îles Canaries. Elle est d’origine punique.
Rick Rozoff est un militant pour la paix et analyste de la géopolitique internationale depuis quarante ans.
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