Ali Abunimah
Khader Adnan,
actuellement en grÚve de la faim dans une prison israélienne, court le
risque de mourir sâil nây a pas un soutien au niveau international.
Signez la pétition auprÚs de la croix rouge internationale :
http://signon.org/sign/khader-adnan... *
Au moment oĂč vous lirez ces lignes, Khader Adnan pourrait ĂȘtre
mort. AprĂšs 58 jours complets en grĂšve de la faim, son corps a largement
dĂ©passĂ© le stade oĂč ses organes vitaux peuvent cesser de fonctionner Ă
tout moment. Mais Khader Adnan est en train de mourir pour vivre.
Ce boulanger de 33 ans palestinienne, mari,
pÚre, et étudiant diplÎmé a refusé toute nourriture depuis le 18
dĂ©cembre, un jour aprĂšs quâil ait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© lors dâun raid de nuit sur
sa maison familiale par les forces dâoccupation israĂ©liennes en
Cisjordanie. Il a perdu plus de 40 kg et sa femme Rand et ses filles,
encore jeunes, ont décrit son aspect comme « bouleversant ».
Adnan, qui selon Israël est un membre du
Jihad islamique, sâest vu appliquer une « dĂ©tention administrative » de
quatre mois dĂ©cidĂ©e par lâarmĂ©e israĂ©lienne - ce qui signifie quâil est
dĂ©tenu sans inculpation et sans possibilitĂ© dâun procĂšs, une pratique
utilisĂ©e par IsraĂ«l et qui remonte Ă lâĂ©poque coloniale britannique.
Hier, un tribunal militaire israélien a
rejetĂ© le recours dâAdnan contre sa dĂ©tention arbitraire. Adnan ayant
jurĂ© de poursuivre sa grĂšve de la faim jusquâĂ ce quâil soit libĂ©rĂ© ou
inculpĂ©, le juge - un officier de lâarmĂ©e israĂ©lienne - aurait aussi
bien pu condamner Adnan Khader Ă mort. Sauf sâil y a dâurgence une
intervention internationale...
Bien que sa vie soit pendue Ă un fil, son courage reste intact.
« Lâoccupant israĂ©lien est allĂ© jusquâaux
pires extrémités contre notre peuple, en particulier les prisonniers, » a
Ă©crit Adnan dans une lettre publiĂ©e par le biais de son avocat. « Jâai
été humilié, battu, harcelé par les interrogateurs et pour aucune
raison, et jâai donc jurĂ© devant Dieu que je lutterai contre la
politique de dĂ©tention administrative dont moi-mĂȘme ainsi que des
centaines de mes codétenus sommes les victimes. »
Selon Amnesty International, qui a publié
deux appels urgents pour Adnan, le 31 décembre dernier, 307 Palestiniens
étaient en détention administrative dans les prisons israéliennes, dont
21 membres du Conseil législatif palestinien élu en janvier 2006.
« Je, soussigné, affirme que je résiste aux
occupants non pas pour mon propre intĂ©rĂȘt en tant quâindividu, mais
pour lâamour de milliers de prisonniers qui sont privĂ©s des plus
Ă©lĂ©mentaires Droits de lâHomme, tandis que le monde et la communautĂ©
internationale restent passifs », a écrit Adnan dans sa lettre.
En plus dâAmnesty, Human Rights Watch a aussi entendu le message dâAdnan, demandant Ă IsraĂ«l de le libĂ©rer ou de lâinculper.
Lâinsistance dâAdnan pour sa dignitĂ© et sa
libertĂ© et son refus dâĂȘtre brisĂ© par un oppresseur dâune puissance
extrĂȘme, contrastent fortement avec les actions de plus en plus
improvisées et dénuées de scrupules des dirigeants palestiniens qui
continuent à faire de douteuses offres de « réconciliation » qui ne
mÚnent nulle part, et poursuivent avec Israël de soi-disant
« nĂ©gociations » qui nâont aucune chance de libĂ©rer Khader Adnan, ni ses
filles ni les millions de leurs compatriotes qui vivent sous
lâoccupation israĂ©lienne, la colonisation et lâapartheid.
Adnan a gagné le soutien de gens partout
dans le monde. Des centaines de personnes ont organisé des
manifestations pacifiques devant la prison israĂ©lienne dâOfer - oĂč ces
personnes ont subi violence et arrestations de la part la police
israĂ©lienne - et dâautres manifestations ont eu lieu Ă Washington DC,
New York et Chicago. Beaucoup dâautres personnes ont jeĂ»nĂ© en solidaritĂ©
avec Adnan.
Le combat de Khader Adnan nous rappelle que la non-violence nâest pas un choix facile. Il est souvent le plus difficile.
Pourtant, le monde ne parvient toujours pas
Ă agir. Lâorganisation de dĂ©fense des prisonniers palestiniens,
Addameer, a trĂšs certainement dit vrai en affirmant quâelle « tenait la
communauté internationale pour responsable de ne pas prendre les mesures
nĂ©cessaires pour sauver la vie de Khader ». Elle a exigĂ© « que lâUnion
europĂ©enne, lâOrganisation des Nations Unies et le ComitĂ© international
de la Croix-Rouge interviennent immĂ©diatement auprĂšs dâIsraĂ«l avant
quâil ne soit trop tard ».
Et il y a le silence pesant de voix de
premier plan comme Nick Kristof du New York Times, célÚbre pour
exploiter des histoires individuelles afin dâattirer lâattention sur les
violations des Droits de lâHomme Ă travers le monde. Dans une colonne
publiée en 2010 et intitulée « En attendant Gandhi », Kristof
réprimandait les Palestiniens pour ne pas adopter des tactiques
non-violentes.
Bien sûr, Kristof ne connaissait pas, ou
Ă©tait tout simplement ignorant de lâhistoire riche et contemporaine de
la résistance populaire en Palestine - si bien documentée par Mazin
Qumsiyeh dans son récent livre, Popular Resistance in Palestine : a
History of Hope and Empowerment [la résistance populaire en Palestine :
lâhistoire dâun espoir et dâune montĂ©e en puissance] - qui inclue les
grĂšves de la faim. Des centaines de prisonniers palestiniens se sont
lâautomne dernier, imposĂ©s des semaines de grĂšve de la faim contre les
conditions carcĂ©rales punitives israĂ©liennes, et beaucoup dâentre eux
sont en grĂšve de la faim aujourdâhui en solidaritĂ© avec Adnan.
Mais si Kristof et dâautres prĂ©tendent ĂȘtre
« en attente de Gandhi », pourquoi nâinterviennent-ils pas pour Adnan ?
AprĂšs tout, câest le Mahatma Gandhi lui-mĂȘme qui, alors quâil Ă©tait
emprisonné à répétition par les Britanniques, a utilisé la grÚve de la
faim pour capter lâattention internationale sur la cause de son peuple.
De mémoire plus récente sont les grÚves de
la faim en Irlande par lâIRA et les prisonniers rĂ©publicains dans la
prison de Maze à Belfast en 1980-81. Dix de ces hommes - le plus célÚbre
Ă©tant Bobby Sands qui, Ă 27 ans, a endurĂ© 66 jours - ont jeĂ»nĂ© jusquâĂ
la mort. Au cours de cette grĂšve, Sands a mĂȘme Ă©tĂ© Ă©lu membre du
Parlement britannique - un fait encore commémoré sur les murs de Belfast
par lâapposition des lettres « MP » aprĂšs son nom sur les fresques
murales.
Le gouvernement de Margaret Thatcher avait
refusé de céder aux revendications des grévistes de la faim, lesquels
voulaient ĂȘtre traitĂ©s comme des prisonniers politiques. Pourtant leur
sacrifice a renforcé un soutien au niveau mondial et a fort embarrassé
les Britanniques. La pression ainsi exercée a sans doute contribué à la
paix.
La semaine derniĂšre, Tommy McKearney qui a
passé 53 jours en grÚve de la faim en 1980, a envoyé un message vidéo de
solidaritĂ© avec Khader Adnan. McKearney, lui-mĂȘme un ancien membre de
lâIRA, a vĂ©cu pour contribuer Ă la paix dans son pays tout comme ses
camarades lâont fait en allant jusquâĂ mourir.
Mais il aurait été plus sage que Bobby
Sands et ses camarades nâaient pas eu Ă mourir, et que des politiques
plus humaines aient prĂ©valu Ă lâĂ©poque. Et il ne faut pas que Khader
Adnan meurt aujourdâhui ou demain. Mais câest au monde Ă sâexprimer
maintenant et Ă le sauver.
La détermination, le courage sans
concession et lâesprit de sacrifice dâAdnan ont capturĂ© la pensĂ©e et le
soutien de beaucoup de gens à travers le monde. Il mérite notre respect,
mais le plus important en ce moment, câest que nous fassions entendre
notre voix pour lui.
*Ali Abunimah est lâauteur de One Country, A
Bold Proposal to End the Israeli-Palestinian Impasse. Il a contribuĂ© Ă
The Goldstone Report : The Legacy of the Landmark Investigation of the
Gaza Conflict.
Il est le cofondateur de la publication en ligne The
Electronic Intifada et consultant politique auprĂšs de Al-Shabaka, The
Palestinian Policy Network.
Note :
* Texte de la pétition en français :
« Nous vous écrivons pour protester contre
votre inaction devant la situation de Mr. Adnan Khader, en grĂšve de la
faim depuis le 17 Décembre 2011. Mr. Khader proteste contre sa détention
administrative par les autoritĂ©s dâoccupation israĂ©lienne. La dĂ©tention
dâAdnan est basĂ©e sur un ordre militaire secret dont ni lui, ni son
avocat ne peut connaĂźtre la teneur. DâaprĂšs cet ordre, il doit rester en
prison pour six mois, pĂ©riode qui peut ĂȘtre renouvelĂ©e sans limitation.
Sa détention continue, sans procÚs, ni charges. Selon les lois
humanitaires internationales, câest de la responsabilitĂ© de la Croix
Rouge internationale dâintervenir pour sauver sa vie en exerçant des
pressions sur le gouvernement IsraĂ©lien pour quâil le relĂąche. »
14 février 2012 - Al-Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.aljazeera.com/indepth/op...
Traduction : Info-Palestine.net - Claude Zurbach
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